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3 questions à

Temps de lecture : 5 min

06/02/2019

Rémy GERIN

Professeur à l’ESSEC, Directeur de la Chaire Grande Consommation (1)

Le secteur de la Grande Distribution est en pleine mutation : révolution digitale, ubérisation des modèles à travers les startups, prise de pouvoir par le consommateur, nécessaire responsabilité à l’égard des hommes et de la planète… La loi du 30 octobre 2018 relative à « l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire, et une alimentation saine, durable et accessible à tous » ajoute de nouveaux défis dans le domaine alimentaire.

1/ Quelles sont les principales mutations que la Grande Distribution doit affronter aujourd’hui ?

Les grandes mutations et les défis du commerce peuvent se résumer ainsi :

-La concurrence de nouveaux acteurs (qui ne sont pas toujours soumis aux mêmes exigences fiscales et sociales) ;

-Un monde digital qui va progressivement installer la notion de transparence au cœur de tous les liens ;

-Des technologies qui foisonnent et au regard desquelles il faut faire des choix engageants ;

-La défiance à l’égard des marques et le besoin de nouveaux repères ;

-L’atonie relative de la consommation face à une offre de m2 en croissance permanente ;

-Un consommateur en attente d’engagements responsables, mais toujours sans concession sur le prix.

Cela vaut pour tous les types de produits et services.

2/ Y-a-t-il une évolution spécifique dans le secteur alimentaire, soit du fait des modes de consommation, soit de l’offre des produits proposés ?

Les ruptures sont souvent et alternativement filles de l’offre et de la demande :

-La recherche de différenciation entre enseignes les pousse à développer des offres segmentantes et parfois uniques, sur des segments bio, vegan par exemple. Et aussi en faisant appel à de multiples producteurs locaux ;

-One Planet One Health, la signature installée par Danone il y a 2 ans résume bien l’évolution des consciences des consommateurs, et le lien entre l’économie, l’alimentation et la santé. Les consommateurs savent et comprennent aujourd’hui à peu près tout. Ils exercent donc une pression croissante quant à la « sustainability » de leur alimentation.

C’est donc la conjonction de ces évolutions à la fois de l’offre et de la demande qui provoque ces mutations observées.

3/ L’élévation de 10 % du seuil de revente à perte (SRP) sur les produits alimentaires au 1er février 2019 prévue par la loi « EGALIM » entraînera-t-elle vraiment une hausse des prix ?

Il y aura (et il y a déjà) de l’inflation sur certains produits : Ricard, Coca-Cola, Nutella, etc…

Mais ces évolutions liées au nécessaire alignement sur un SRP revu à la hausse seront en grande partie compensées par :

-De nouvelles mécaniques promotion/fidélisation que les enseignes vont mettre en œuvre pour ne pas abîmer leur image prix ;

-Une habitude de péréquation de la part de ces acteurs, nécessaire dans un monde de concurrence, qui peut les conduire à baisser les prix (et à le faire savoir) sur d’autres références historiquement mieux margées ;

-Et puis, les MDD (marques de distributeur NDLR) seront toujours le refuge naturel du consommateur en cas éventuel de trop grande dérive, comme elles l’ont été en 1997 après la Loi Galland.

Au global, il y aura peu d’impact à mon sens sur le pouvoir d’achat des ménages.

(1) La Chaire Grande Consommation a été créée par l’ESSEC dès 1985 pour faire grandir les synergies entre le monde de l’entreprise et la recherche académique.

Légende photo : Rémy GERIN