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Points de vue

Temps de lecture : 3 min

01/07/2022

Souveraineté et incertitudes

Si la question de la souveraineté alimentaire ne date pas d’hier, le COVID et plus récemment la crise ukrainienne, ont remis à l’ordre du jour ce sujet on ne peut plus important. En lançant l’initiative Food and Agriculture Resilience Mission (FARM) en mars dernier, Emmanuel Macron souhaite d’ailleurs prévenir des conséquences du conflit ukrainien sur la sécurité alimentaire mondiale.  Bien que l’alimentation et de surcroit l’agriculture concernent tout le monde sur Terre, certains ont longtemps oublié qu’on ne peut produire tout, tout le temps et partout. Ces inégalités pédoclimatiques sont l’essence même du besoin d’échanger avec, d’un côté les exportateurs, et de l’autre, les importateurs.

De 105 Mt en 2002, les exportations mondiales de blé atteignent cette année 204 Mt, rendant primordial le rôle de certains pays dans la sécurité alimentaire à travers le globe. Or l’environnement dans lequel nous vivons est de plus en plus incertain et l’instabilité particulièrement forte, ce qui rebat les cartes des flux mondiaux.

L’incertitude fut d’abord sanitaire avec une pandémie mondiale qui a déséquilibré les marchés. Principal protagoniste de ce bouleversement, la Chine a augmenté ses importations de blé, d’orge et de maïs de 33 Mt pour atteindre les 52 Mt entre 2019 et 2020. En souhaitant sécuriser les stocks chez elle, l’empire du Milieu a acheté son indépendance face à des risques logistiques qui se sont intensifiés.

L’incertitude fut également d’ordre météorologique avec un nombre de jours inhabituellement chauds ou inhabituellement froids. Face à ce constat, les productions sont de moins en moins certaines, à l’image du Canada qui a vu sa récolte de blé chuter de -10 Mt en 2021 par rapport à sa moyenne 5 ans, à 22 Mt.

L’incertitude est également économique avec une inflation galopante, obligeant les banques centrales à réagir. Après avoir mené une politique accommodante, marquée par un afflux de liquidité, un durcissement du ton est nécessaire. Pour autant, le risque de récession est au cœur des interrogations, rendant l’exercice difficile pour ne pas bouleverser à nouveau l’ensemble des marchés.

Enfin, l’incertitude est surtout politique à l’heure actuelle avec sur le devant de la scène, le conflit russo-ukrainien. Bien malin celui qui pourra prédire l’issue de ce dernier et si les considérations humaines sont toujours prioritaires, le sujet de la sécurité alimentaire mondiale est également notable. La place de l’Ukraine et la Russie dans l’échiquier mondial n’est plus à rappeler et les blocages logistiques sur la zone mer Noire catalysent toutes les craintes. De 6 Mt d’exports tous grains par mois en début de campagne, l’Ukraine affiche désormais un rythme moyen de 1,5 Mt. Face à cela, certains pays habitués à s’approvisionner dans cette région doivent trouver d’autres alternatives. C’est ainsi que la demande mondiale se concentre vers de moins en moins d’exportateurs, faisant grimper les prix dans ces régions.

La période dans laquelle nous vivons rappelle donc la nécessité pour un Etat d’être souverain lorsque l’on parle alimentation tant l’acte de se nourrir est vital. Certains pays ne peuvent l’être, les agriculteurs concentrant les meilleures conditions pédoclimatiques à produire davantage afin de couvrir les besoins de tous les marchés. Le challenge de produire plus doit être accompagné de celui de produire mieux. Fort heureusement il est possible de concilier les deux grâce notamment à la science.

L’agriculture est un secteur stratégique qui doit se doter d’une vision cohérente et sur le long terme afin de relever les nombreux défis associés, soyons en certain !