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Temps de lecture : 4 min

21/12/2023

Journées agroalimentaires de l’UE: une édition 2023 riche en prospectives

EU Agri-Food Days European Commission_ - agriculture-ec-europa-eu Crédit image : Commission européenne

Du 5 au 8 décembre 2023, se sont tenues les « Journées agroalimentaires de l’UE » qui ont donné lieu à un programme dense de conférences. La première journée, non ouverte au public, a été consacrée à une rencontre des parties prenantes UE-Canada sur le thème de l’agriculture durable, des progrès réalisés de part et d’autre, et des priorités futures dans le cadre du dialogue bilatéral sur le sujet.

Lors de la conférence Agri-Digital du 8 décembre, le Centre commun de recherche de la Commission européenne (JRC) a présenté son rapport « Transition numérique : implications à long terme pour les agriculteurs et les communautés rurales de l’UE ». Cette prospective qui explore l’interaction entre la transition numérique, les politiques publiques et l’évolution agricole et rurale, propose les éléments d’une stratégie européenne efficace de transition numérique pour l’agriculture et les zones rurales ainsi qu’une boite à outils à l’intention des décideurs publiques.

Sur la base de 4 scenarii très tranchés, le rapport explore leurs conséquences pour l’agriculture à l’horizon 2040. Celui intitulé « naviguer au milieu des tempêtes », qui suppose une augmentation de la température de 3° à la fin du siècle, conduit à des insécurités alimentaires et à l’adoption de technologies digitales frugales. « Fin de partie » va plus loin avec une élévation de température de 4° dans un scénario qui conduirait les producteurs à des technologies à bas intrants et à constituer des micro-réseaux digitaux entre eux. Dans « Synergies en conflit », pour lequel la transition énergétique prime sur les autres objectifs environnementaux, l’augmentation de température est limitée à 1,5°, les agriculteurs bénéficieraient de meilleures conditions de rémunération en constituant des communautés d’échanges digitales en pair à pair, et les zones rurales seraient plus attractives. Enfin « Visions opposées » figure un monde bipolaire dans lequel l’UE serait leader du groupe visant la neutralité carbone, par opposition à ceux qui poursuivraient avec un modèle productiviste, ce qui conduirait à une élévation de température de 2° en 2100. Dans ce scénario, les agriculteurs très investis dans le domaine digital seraient vulnérables aux failles technologiques, tandis que ceux ayant fait le choix « low tech » seraient plus résilients.

Après avoir souligné la nécessité de formation aux outils digitaux et l’accessibilité aux réseaux, le rapport recommande une structuration de l’écosystème digital et de la gestion des données comme la nécessité de financer les investissements d’infrastructure.

Au cœur des Journées agroalimentaires de l’UE, la Conférence 2023 des perspectives agricoles de l’UE a donné lieu à des sessions interactives sur les thèmes de l’agriculture européenne à l’horizon 2040, de la transition agricole ou encore du défi de la sécurité alimentaire pour les agriculteurs. En abordant le sujet des meilleures pratiques mises en avant par les « plans stratégiques nationaux » (PSN), la Commission a présenté le travail considérable d’analyse systématique et détaillé des 27 PSN consultables en ligne (« Catalogue of CAP interventions »). Ce fichier permet d’accéder pour chaque État membre à l’ensemble des lignes d’intervention renseignées en termes de description et de budget. Cette vision exhaustive illustre les disparités des plans nationaux et pourrait servir les actions correctrices visant à plus d’homogénéité et de conformité aux objectifs de la PAC.

Enfin, le rapport « Perspectives agricoles européennes 2023-2035 », élaboré en coopération entre la DG AGRI, le JRC et les familles professionnelles, permet de se projeter dans un futur fictif de l’Union à 27 sans prise en compte des élargissements en cours de négociations. Cet exercice académique présente néanmoins l’intérêt de dessiner à grands traits les évolutions à venir pour les différentes filières. Ainsi les grandes cultures devraient connaitre une stabilité des rendements qui conduirait à la poursuite de la progression des productions de blé et de maïs, comme des légumineuses et du soja, et à la réduction des importations d’oléagineux et de protéagineux. La demande d’aliments du bétail devrait se réduire, impactée par le glissement vers des élevages bovins plus extensifs et l’amélioration des ratios de conversion. Tandis que la production de betteraves à sucre pourrait connaitre un déclin à proportion d’une moindre consommation de sucre, la demande pour les biocarburants se réduirait en fonction de la décarbonation des transports routiers. En matière laitière, l’augmentation de la productivité devrait se poursuivre, mais la réduction du cheptel comme la déprise agricole dans le secteur devrait induire une baisse de la production à l’horizon 2035. La consommation de viande bovine affectée par des prix élevés, par des considérations de santé et de durabilité, devrait conduire à une réduction de la production, elle-même soumise à de fortes contraintes réglementaires et des niveaux restreints de profitabilité. De même la production porcine devrait marquer un déclin du fait des contraintes environnementales, des critiques sociétales adressées aux élevages intensifs, et des risques d’épizooties. De toutes les viandes, le secteur des volailles serait le seul à connaitre une progression du fait d’une image favorable, de l’absence de restrictions religieuses et d’un prix modéré. L’expansion de la production serait réservée aux régions qui ne seraient pas contraintes par des réglementations environnementales.

Au terme du rapport, deux scénarii ont été envisagés :

  • Le premier prend en compte l’impact du changement climatique qui favoriserait l’augmentation des surfaces de maïs, de riz, de soja et de blé aux dépens des autres cultures. Dans cette hypothèse, les rendements seraient affectés négativement, de sorte que les accroissements de surface ne permettraient pas de contrebalancer les baisses de production. Les moindres disponibilités d’aliments pour les animaux et des prix plus élevés pèseraient sur les secteurs porcs et volailles, tandis que le secteur bovin à l’herbe pourrait bénéficier de la situation ;
  • L’autre scénario qui repose sur l’adoption à grande échelle de pratiques de séquestration du carbone et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, permettrait d’atteindre ces objectifs avec néanmoins une efficacité à long terme réduite du fait de la capacité limitée de séquestration des sols agricoles, et affecterait négativement les revenus agricoles.

 

Indépendamment de la richesse du contenu des conférences organisées par la Direction Générale de l’agriculture de la Commission européenne, il faut enfin souligner l’intérêt des échanges entre les 700 participants présents à Bruxelles début décembre 2023 lors d’un événement qui a réuni des fonctionnaires européens, des représentants des États membres et ceux des différentes parties prenantes de l’écosystème agroalimentaire européen.