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Points de vue

Temps de lecture : 4 min

30/04/2021

Alimentation : l’ère de la “coopétition” est devant nous

Depuis plus de dix ans, la chaîne alimentaire est confrontée à quatre grandes mutations qui impactent profondément les modèles économiques de ses entreprises.

D’abord la structure socio-démographique connaît une mutation accélérée avec le vieillissement de la population, la baisse de la taille des ménages qui pèse sur le budget alimentaire en gonflant celui du logement, et la sédentarisation. A cela s’ajoute une fragmentation inédite de la société qui montre des aspirations souvent opposées entre groupes affinitaires. On s’éloigne du « One size fits all » de la grande consommation.

Les usages alimentaires changent aussi. Certes, la tendance au manger mieux est assez généralisée, dont une forte poussée du localisme, mais en regard les moyens de nos compatriotes sont très hétérogènes. Surtout, le repas à la française cède du terrain aux modèles importés, tant sur le rythme (développement du on-the-go, multiplication des prises alimentaires) que sur les goûts (aucun plat de tradition française dans le top des ventes des livreurs à domicile).

Face à cela, les canaux de distribution de l’alimentation, autrefois simples (pour l’essentiel restaurants d’un côté, hypermarchés de l’autre) deviennent complexes et protéiformes. De nouveaux intervenants débarquent sur le marché bouleversant les chaînes de valeur. Le drive (voiture, piéton, restaurant), la livraison à domicile, les hypers où l’on mange, les restaurants-épiciers, les dark-kitchens, tout est en mouvement et change l’offre proposée au e-consommateur.

Enfin, l’urgence écologique et d’abord climatique est dans toutes les têtes. L’alimentation apparaît à nos compatriotes comme un des premiers leviers. Et s’il est vrai que ce besoin essentiel impacte lourdement le climat, les professionnels savent aussi que l’agriculture est sans nul doute une des premières solutions à ce défi.

Sur tous ces sujets, la crise de la Covid-19 n’a fait qu’accélérer les mutations en cours, notamment digitale, et la prise de conscience des enjeux écologique et de souveraineté. Contraignant aussi le pouvoir d’achat, elle rappelle aux acteurs qu’il va falloir devenir plus efficace. Retrouver de la valeur par la marge plus que par le prix.

Tout cela fait de la mutation de la chaîne alimentaire, avec l’énergie, le défi majeur de notre temps. Les entreprises en place sont pleinement conscientes des enjeux. Pour autant, force est de constater que les évolutions sont lentes, freinées par le poids de l’histoire, l’équation économique légitime de chacun et il faut bien le dire, par une qualité des relations très perfectible dans la filière.

Disons-le : il est impossible aujourd’hui aux acteurs, même aux plus gros, de changer seuls. Les transformations sont écosystémiques. Les entreprises vont devoir apprendre à changer leur modèle avec et en même temps que leurs clients, leurs fournisseurs, leurs concurrents parfois. C’est une ère de coopétition qui s’ouvre.

Les défis sont immenses. Ils sont gagnables. Au reste, les esquiver est impossible, les perdre est impensable.

Au niveau national comme à l’échelon local, les acteurs vont devoir apprendre à collaborer, à repenser ensemble la chaîne alimentaire. Il est possible et nécessaire de regrouper les énergies pour ensemble, faire mieux…

Philippe Goetzmann, consultant, Philippe Goetzmann &