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Points de vue

Temps de lecture : 5 min

27/07/2023

Les incertitudes climatiques et géopolitiques déstabilisent les marchés

Récolte française de blé tendre : Entre espoir et déception
Cette année encore, le mot hétérogène ressort lorsqu’il s’agit de commenter l’état de la récolte de blé tendre en France. Moisson après moisson, ce terme revient et reflète bien la situation puisqu’une nouvelle fois, la qualité des terres, la profondeur des sols et les passages pluvieux auront été déterminants. D’un potentiel particulièrement homogène et prometteur à la mi-mai dans l’hexagone, le résultat final déçoit autant qu’il surprend selon les zones. Le déficit hydrique du mois de juin n’aura pas été sans conséquence et aura engendré une envolée des quintaux dans bon nombre de parcelles. Bien que la moisson se poursuive, les échos de rendements permettent aux différents analystes d’établir une prévision de récolte entre 35 et 36 millions de tonnes (Mt). Affichée par FranceAgriMer à 35 Mt, la production française de blé tendre serait en hausse de 4 % par rapport à l’an dernier et supérieure aux 34,37 Mt en moyenne ces 5 dernières années. Avec de tels volumes, l’objectif export est évalué à 17,51 Mt par l’organisme, réparti entre 7,79 Mt vers l’Union européenne et 9,6 Mt vers les pays tiers. Ces chiffres montrent une nouvelle fois l’importance du débouché export pour un pays comme la France, d’autant plus en cette période de turbulences sur la scène internationale.

Un corridor céréalier pour détendre la situation

Largement et tristement mis en lumière depuis plus d’un an maintenant, la place de l’Ukraine et de la Russie dans les exportations de grains au niveau mondial ne fait plus de doute pour personne. Une fois de plus, les évènements tragiques qui se déroulent dans cette région du monde viennent animer les marchés et renforcent la volatilité sur les cours. Seul compromis depuis le depuis du conflit, le corridor céréalier permettait depuis août 2022 à l’Ukraine d’exporter via trois ports d’Odessa. Après un premier renouvellement en novembre 2022, puis en mars et enfin en mai, ce sont 33 Mt de grains qui ont pris le large pour répondre à la demande des acheteurs internationaux. Avec 8 Mt, la Chine est la première destination à bénéficier directement de cet accord, suivie de l’Espagne avec 6 Mt et de la Turquie à 3 Mt. Etant considérées comme non prioritaires, ces destinations participent aux revendications du Kremlin qui juge que ces acheteurs ne faisaient pas partie de la liste prioritaire. Or, ces flux libèrent incontestablement des volumes pour d’autres fournisseurs, notamment à destination des pays du continent africain. De manière tout aussi logique, les cours internationaux ont salué l’initiative, à l’image du blé Euronext qui est passé de 340 €/t en août 2022 à 225 €/t début juillet 2023. Depuis cette date, les choses ont encore changé puisque le renouvellement du corridor du 17 juillet 2023 n’a pas eu lieu…

 

L’escalade dans les tensions en zone mer Noire catalyse les regards

En annonçant que les éléments n’étaient pas réunis pour une reconduite de l’accord, la Russie suspendait de fait sa participation au corridor. A force de propos allant en ce sens, les marchés s’étaient fait à l’idée, ce qui n’a pas créé d’onde de choc sur les cours internationaux. De plus, les alternatives développées permettaient de compenser une partie des volumes. C’était sans compter sur les nouvelles attaques visant les infrastructures portuaires d’Odessa puis plus récemment de Reni sur les ports du Danube. Ces nouveaux éléments apportent un degré d’incertitudes supplémentaires, propulsant les matières premières agricoles vers des niveaux abandonnés il y a quelques mois maintenant. A court terme, toute nouvelle déclaration d’un des protagonistes animera les cours, poussant tous les acteurs du marché à la prudence. Ce catalyseur n’en fait pour autant pas oublier qu’à moyen terme, les offres françaises devront gagner en compétitivité pour conquérir des parts de marché. A ce jour, l’écart entre les prix hexagonaux et les prix mer Noire notamment, annule toute chance de conquérir des parts de marché et de renforcer par le fait notre poids sur la scène internationale.

La période actuelle renforce les incertitudes autour des marchés et du monde agricole. La perte de repères chez bon nombre de producteurs ne doit pas entacher notre capacité à aller de l’avant. Il faut pour cela penser global avec une stratégie long terme sans que les décisionnaires nationaux et européens changent les règles du jeu en cours de route. Les éléments dramatiques en Ukraine remettent la souveraineté alimentaire au milieu des débats alors que dans le même temps, l’Europe imposerait 4 % de jachères pour les années à venir. Quel paradoxe difficilement soutenable lorsque l’on sait l’importance de la production française en réponse à la demande internationale. Faisons de notre agriculture une force, cultivons notre compétitivité et renforçons notre poids sur la scène internationale, nous en ressortirons fortement grandis.