Cette interview fait suite à celle de Marc Bonnet, Directeur général de la Filière CRC® réalisée en 2021. Anne Pigeyre est intervenue à l’événement du 12 mars 2024 « One Health / Une seule santé : augmentée, territoriale, avec les agriculteurs » et nous a fait le plaisir de répondre à nos questions. Le modèle de cette filière s’intègre en effet parfaitement à notre vision d’un One Health opérationnel, reposant sur des bases scientifiques et économiques.
1/ La part de marché de la filière CRC® n’est plus une niche aujourd’hui puisqu’elle représente 12 % de la production nationale de blé valorisé en meunerie et panification ou biscuiterie. Quels sont les chiffres-clés de cette filière certifiée ?
Effectivement, la Filière CRC® représente aujourd’hui près de 3 500 agriculteurs, 36 coopératives et négoces, 58 meuniers qui fournissent 5 200 artisans boulangers partenaires. De plus, elle comprend 29 groupes industriels opérant sur 68 sites et 8 distributeurs. Près de 100 000 hectares ont été emblavés en céréales CRC pour une récolte de plus 638 000 tonnes en 2023. Cette production a été multipliée par 3 en 10 ans !
Il s’agit principalement de blé tendre, les autres productions sont le blé dur, le seigle, le sarrasin et le grand épeautre.
2/ Comment la filière CRC® contribue-t-elle à la fois à la santé environnementale et à la santé économique des territoires et des entreprises de la chaîne de valeur ?
La filière a été initiée avec l’ambition de proposer des produits bons pour l’homme et pour la nature. Le cahier des charges a donc été pensé pour limiter au maximum l’impact sur l’environnement tout en garantissant la qualité sanitaire et technologique du produit, ainsi que le rendement qui conditionne le revenu et donc la pérennité des exploitations agricoles. Le rendement agricole engendre une biomasse qui favorise le stockage de carbone, ne l’oublions pas !
Concrètement, cela se traduit par des pratiques agricoles raisonnées et justifiées, une liste d’intrants soigneusement sélectionnés après évaluation par l’équipe R&D, excluant ceux ayant le plus d’impacts néfastes sur la santé humaine et environnementale. De plus, l’utilisation d’insecticides de stockage, qui sont ceux que l’on a le plus de risque de retrouver dans les produits finis, est proscrite. Les pratiques mises en œuvre par les agriculteurs de la Filière sont reconnues comme favorables à la biodiversité par les pouvoirs publics.
Sur le plan économique, la Filière CRC® représente une production 100% française répartie sur une vaste portion du territoire. Les adhérents de la filière participent au maintien d’un maillage de production et d’activité au niveau local, qu’il s’agisse des plus petites « unités » que sont les agriculteurs et les boulangers, d’organismes stockeurs et de meuniers à une échelle locale ou de grands groupes à l’échelle nationale ou internationale. Cette production de qualité est mieux valorisée que les productions plus standardisées.
De plus, notre fonctionnement en filière est construit sur une logique de débouchés assurés, où chaque production est destinée à une transformation spécifique et à un marché identifié. La finalité est que toutes les productions trouvent preneur.
Enfin, un système de prime à la tonne a été instauré dès l’origine pour les producteurs engagés dans la démarche CRC. Cette prime vise à reconnaître leurs efforts pour respecter les exigences des cahiers des charges, contribuant ainsi à une meilleure rémunération des agriculteurs.
3/ Vous lancez en 2024 l’outil de traçabilité Traça-Blé qui élargit la palette des bonnes pratiques à l’empreinte carbone, grâce à la blockchain. Comment fonctionne-t-il et quel est l’objectif de ce nouvel outil ?
Oui, tout à fait. Nous avons développé et lancé le projet Traça-blé en 2022 en partenariat avec Crystalchain, spécialiste de la traçabilité et de la blockchain. Celle-ci est ici une simple technologie qui vient renforcer la robustesse de l’outil et la sécurisation des données.
L’objectif est au départ de digitaliser tout le process de traçabilité de nos adhérents au sein de la plateforme, de leur permettre d’assurer l’interopérabilité de leurs données et de gagner un temps précieux grâce à une exploitation plus efficace de leurs données.
En 2024, nous enrichissons le projet en y incluant la possibilité de réaliser des bilans carbone. En nous appuyant, au moins pour partie, sur les données de traçabilité existantes, nous disposons d’une une base solide pour aller plus loin et travailler l’empreinte carbone de la Filière et de ses adhérents.
Nous proposons à nos adhérents un outil mutualisé, pour réduire le coût d’accès au bilan carbone, et nous les accompagnons dans sa mise en œuvre et sa réalisation. De plus, la mise en place d’un outil commun permet la comparaison pour travailler ensemble des voies de progrès.
Cela fait partie des ambitions de la filière dans le cadre de son plan stratégique Horizon 2030. La filière a, comme chacun, un rôle à jouer pour le climat !