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Temps de lecture : 3 min

21/06/2023

Le blé européen débarque aux États-Unis

A la grande surprise des producteurs nord-américains de blé, les États-Unis qui figurent parmi les grands pays exportateurs mondiaux font désormais face à l’arrivée de blé européen destiné à couvrir une partie des besoins de la meunerie.

Dans une récente publication de son blog, l’US Wheat Associates marque son désappointement, car l’organisation chargée de la promotion des exportations de blé considère que les producteurs américains produisent des quantités suffisantes pour couvrir les besoins domestiques et répondre à la demande des marchés mondiaux.

Les chiffres publiés par le ministère américain de l’agriculture dans son dernier rapport mensuel Wasde font bien apparaitre une augmentation des importations totales : 2,59 millions de tonnes pour la campagne 2021/22, une estimation portée à 3,40 MT pour 2022/23 et une projection à 3,67 MT pour 2023/24. Comme le rappelle l’US Wheat Associates, la meunerie américaine procède régulièrement à des achats de blé de printemps canadien, de même que des blés fourragers canadiens sont appelés à couvrir une partie des besoins des productions littorales de porcs et de volailles. Ces courants d’échanges sont normaux dans le cadre de l’USMCA, l’accord de libre-échange conclu entre les États-Unis, le Mexique et le Canada qui a succédé au NAFTA sous la présidence de Donald Trump.

La nouveauté résulte de l’évolution des écarts de prix entre les différentes origines : en mai 2023 le prix FOB des origines polonaises et allemandes cotaient 107 US$ en dessous du prix FOB Golfe pour la qualité Hard Red Winter. Ainsi les meuniers ont-ils remplacé une partie de leur couverture domestique par des achats de blé européen. Cette évolution exceptionnelle et inattendue est la conséquence de la situation des marchés européens des céréales dans la mesure où l’Union européenne a concédé à l’Ukraine l’accès sans droits de douane à ses marchés.

Par un effet de dominos, l’UE, deuxième producteur et deuxième exportateur mondial de blé, est soumise à de fortes pressions du fait des introductions de blé ukrainien par voie terrestre. Bénéficiant du régime douanier de la mise en libre pratique[1], ces marchandises sont promises à la réexportation dans la mesure où les 5 pays frontaliers de l’Ukraine ne permettent pas leur utilisation sur place pour protéger les mises en marché de leurs productions nationales.

Alors que les stocks européens de blé en fin de campagne devraient atteindre le niveau de 16,7 MT fin juin 2023 selon l’USDA, en progression de 3,5 MT par rapport à 2022, les États-Unis connaissent une situation inverse passant de 19,1MT à 16,3MT du fait notamment de la sécheresse qui a affecté la production de Hard Red Winter. Enfin les producteurs américains pointent les effets négatifs de la logistique en considérant que le fret maritime pour les blés européens représente en moyenne la moitié du coût du transport par fer des régions de production américaines vers leurs clients meuniers.

75 ans après la mise en œuvre du Plan Marshall qui s’était traduit par des exportations américaines de blé à destination d’une Europe meurtrie par cinq années de guerre, voici que les États-Unis connaissent les effets collatéraux de l’invasion russe de l’Ukraine. Le « débarquement » du blé européen sur les rives d’outre-Atlantique est cependant peu de choses si l’on considère combien les États-Unis ont été préservés des bouleversements que l’UE affronte en première ligne sur le marché de l’énergie avec toutes leurs conséquences sur le prix de revient des blés européens.

 

 


[1] Régime douanier qui confère à une marchandise tierce le statut de marchandise communautaire après application des mesures de politique commerciale ou d’autres formalités prévues pour l’importation.