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Points de vue

Temps de lecture : 5 min

26/01/2024

De quoi le mouvement social agricole actuel est-il le nom ?

Tout semble avoir été dit et écrit sur l’origine et les causes du mouvement social agricole actuel. En outre, on ne peut pas savoir à ce stade comme il peut évoluer. On peut néanmoins d’ores et déjà en tirer quelques enseignements.

1 – Par-delà les enjeux de revenus et de normes, ce mouvement tend à mettre en évidence la question de l’invisibilité d’un certain nombre de catégories sociales et socioprofessionnelles, qui sont à la fois les « murs porteurs » de la société, sans lesquelles celle-ci ne peut fonctionner au quotidien, et le plus souvent peu visibles dans l’espace public, peu valorisées socialement et mal rémunérées. C’est bien évidemment le cas des agriculteurs, à l’instar d’un Jérôme Bayle, qui est devenu le symbole de cette contestation. Cet éleveur de Haute-Garonne victime d’un accident de tracteur en 2011, a repris la ferme familiale quelques années plus tard après le suicide de son père et alors même que sa mère agricultrice retraitée gagne 217 euros par mois.

 

2 – Par beaucoup d’aspects, ce mouvement de contestation se situe dans la lignée des mobilisations agricoles que l’on a pu régulièrement observer au moins depuis les années 1960 : barrages routiers, actions visant des préfectures, épandage de fumier, destruction de denrées… On voit bien malgré tout que, ces dernières années, le seul moyen que certaines catégories ont trouvé pour se montrer, se faire entendre et espérer faire bouger les choses, c’est de bloquer, voire de casser. Ce n’est pas normal qu’il faille un mouvement de contestation de cette ampleur pour que les médias parlent d’agriculture et des difficultés rencontrées par les agriculteurs, que les politiques, le gouvernement et, au-delà, le grand public, puissent en prendre pleinement conscience et tenter d’y apporter des réponses. Cela en dit long sur l’état de notre démocratie sociale et politique, et notamment sur notre incapacité collective à percevoir les malaises sociaux.

 

3 – Enfin, même si les agriculteurs dénoncent souvent les injonctions et les pressions sociétales, force est néanmoins de constater que le mouvement actuel est particulièrement populaire, comme en témoignent les résultats de trois enquêtes d’opinion. 89 % des Français interrogés soutiennent le mouvement de contestation d’après un sondage Odoxa, 82 %, dans une enquête Harris Interactive, et 87 %, selon une enquête Elabe. C’est loin d’être nouveau, la plupart des mobilisations agricoles étant, en effet, populaires.

 

Cette mobilisation, par son ampleur, apparaît aussi en définitive comme une sorte de question de confiance posée par les agriculteurs aux Français et au gouvernement. Or, on peut voir que les Français réaffirment largement leur confiance envers eux : dans l’enquête Odoxa, 93 % des personnes interrogées en ont une bonne opinion et dans celle Elabe, 92 % en ont une bonne image. Par ailleurs, la mansuétude du gouvernement par rapport aux blocages et sa promptitude à vouloir répondre aux revendications des agriculteurs montrent également que celui-ci leur fait confiance et les prend au sérieux. Est-ce que cela suffira à convaincre le monde agricole ?