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17/06/2022

Marchés mondiaux : après l’embrasement, un nouvel équilibre ?

Le 8 juin 2022, Philippe Chalmin, Professeur à l’Université Paris-Dauphine et Yves Jégourel, Professeur au Conservatoire National des Arts et Métiers, ont présenté le rapport Cyclope 2022. Ce volume compte plus de 700 pages et est publié aux éditions Economica. Il propose une analyse de la situation géopolitique internationale et des marchés mondiaux non seulement des matières agricoles, mais également de l’énergie, des minerais et métaux, des grandes industries et des services. En voici les principaux messages.

Au niveau international, la pandémie et la guerre en Ukraine semblent marquer la fin de la mondialisation heureuse, déjà mise à mal par la crise financière de 2008, les difficultés des pays émergents (qui parle encore du fort potentiel de croissance des « BRICS » aujourd’hui ?) et la montée des despotismes.  Aujourd’hui, l’économie de marché est remise en cause, le globe est largement fracturé entre pays autoritaires et démocraties, les problèmes de logistique grippent les chaînes d’approvisionnement.

Ce contexte marque la fin de la promesse d’abondance et la sécurisation de l’approvisionnement devient stratégique sur le temps long.

Selon Cyclope, la guerre en Ukraine a renforcé la crise agricole et a élargi la crise énergétique au pétrole, au-delà du marché du gaz. La crise actuelle qui se manifeste par une flambée des cours depuis quelques mois se situe à quatre niveaux : logistique (prix du fret en forte augmentation, logistique chaotique), énergétique (flambée des prix, choc gazier), climatique (chute de production de canola au Canada en 2021) et agricole (due notamment au fait que la Chine est devenue le premier importateur mondial de grains, et notamment de maïs, en 2021).

Notons que les dernières prévisions[1][2] de l’USDA, datées de juin 2022, semblent chercher à « calmer le jeu » en se voulant rassurantes sur les prévisions de la prochaine campagne 2022/2023. A retenir notamment les bilans prévisionnels du blé et du maïs :

Blé (millions de tonnes) :

La Russie, leader mondial des exportations de blé, devrait renforcer cette position lors de la prochaine campagne. Les exportations de blé russe devraient être favorisées par une production en hausse, celle-ci bénéficiant de rendements plus élevés que ceux de la campagne précédente. L’Ukraine est un acteur moindre sur les marchés mondiaux du blé. La guerre actuelle devrait significativement réduire la production et les exportations de blé de ce pays. Cependant, cette baisse devrait être plus que compensée par la progression des exportations russes et européennes. Les effets des conditions climatiques seront donc à suivre de près sur les rendements en Russie et dans l’UE d’ici la prochaine récolte, en particulier pour répondre à la demande des pays d’Afrique du Nord, où le potentiel de production est réduit par la sécheresse.

Maïs (millions de tonnes) :

Si l’USDA prévoit une baisse importante de la production et des exportations de maïs en Ukraine pour la prochaine campagne, elle n’est pas catastrophiste. Les prévisions de production pour 2022/2023 ont même été relevées par rapport au mois dernier, les surfaces emblavées étant supérieures à ce qui était attendu initialement, malgré le conflit russo-ukrainien. Les estimations de récoltes et d’exportations brésiliennes sont bonnes, mais incertaines. Dans l’hémisphère sud, il faudra encore attendre de longs mois avant que ces prévisions se confirment.

Comme l’affirme la cheffe économiste et Secrétaire générale adjointe de l’OCDE « le monde va payer au prix fort la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine[3] » et les marchés sont tendus, suspendus aux développements de ce conflit et aux impacts du climat sur les récoltes. Le problème est avant tout économique pour les pays importateurs de céréales, car les prix stratosphériques actuels les empêchent d’acheter les ressources céréalières dont ils ont un besoin vital pour nourrir leurs populations[4]. Le niveau de la récolte européenne dans quelques semaines sera plus que jamais crucial pour détendre les marchés.

 


[1] USDA/Office of the Chief Economist (June 10, 2022) World Agricultural Supply and Demand Estimates

[2] USDA/Foreign Agricultural Service (June 2022) World Agricultural Production

[3] Laurence Boone, Le prix de la guerre, OCDE, Ecoscope, 8 juin 2022

[4] Philippe Chalmin, Crise alimentaire : le blé ukrainien n’est pas le problème, Les Echos,  16 juin 2022