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Temps de lecture : 3 min

13/10/2023

Le poulet est-il cuit ?

Jean-Michel SCHAEFFER - Anvol-Conférence de presse

Le chiffre interpelle : 50 % du poulet consommé en France provient de marchés extérieurs, soit 800 000 tonnes d’importation par an ! En cette période où la souveraineté alimentaire est érigée en priorité par le ministère qui porte désormais ce nom, il convient de s’interroger sur les raisons de cette glissade d’une filière d’excellence, encore leader en Europe aux débuts des années 2000. L’interprofession de la volaille de chair, ANVOL, a livré son analyse d’actualité lors d’une conférence de presse tenue le 7 septembre 2023, par ailleurs un Groupe de Travail d’Agridées s’intéresse aux stratégies d’avenir à ce sujet.

Tout n’est pas noir. Au contraire même, la consommation de poulet en France continue de croître, de +4,7% en 2022, soit 22,5Kg par habitant, c’était 15,6 Kg en 2012. Il est prévu que cette progression se poursuive dans les années futures, en France, en Europe et dans le monde. Cela s’explique par la poussée démographique internationale, et dans des pays tels que la France par les qualités de la viande de poulet, ses facilités d’usage et sa consommation multi-canaux (prix, aspects nutritionnels, gammes, praticité…). A l’heure de la végétalisation de l’assiette, du flexitarisme, et de la décarbonation des activités, la demande de poulet a toujours un bel avenir. Mais s’agira-t’il d’un consommer local ?

Du côté de l’offre tout n’est pas rose tant il est vrai que la filière française aimante la plus grande variété d’ennuis et de crises possibles. Il est même difficile de faire pire. L’épizootie d’influenza aviaire a frappé trois fois en 18 mois, impactant le potentiel de production et réduisant chiffres d’affaires et revenus. Aucun autre pays européen n’a été autant touché. Par ailleurs la hausse générale sur les différents coûts de production, pour l’élevage et l’industrie d’abattage-découpe[1], entraîne une inflation alimentaire qui amène les consommateurs à descendre en gamme. En outre, si la principale concurrence internationale provient aujourd’hui d’autres pays communautaires, Pologne-Pays-Bas-Belgique, l’arrimage sans aucune précaution de l’Ukraine au marché intérieur européen et la velléité permanente de l’U.E. de signer des accords de libre échange amènent un flux de produits dont les prix et les conditions de production ne correspondent pas au modèle européen. Enfin, la Restauration Hors Foyer qui est le principal moteur de la croissance de consommation de poulet s’approvisionne très majoritairement hors de France. Plus de consommation, plus d’importation.

Un rebond est crédible si chacun, au sein de la filière française et chez les décideurs publics, conçoit que le poulet constitue un mètre-étalon de notre souveraineté alimentaire, laquelle même si elle y participe ne peut pas se contenter de se diluer dans la seule souveraineté alimentaire européenne au vu du savoir-faire et de la qualité du socle productif français. En termes d’offre, il serait nécessaire d’appuyer la rénovation et de faciliter la création de nouveaux bâtiments d’élevage, de soutenir la modernisation et l’automatisation des sites industriels, de décarboner toute la chaîne, afin de mieux répondre aux évolutions des demandes des consommateurs, et des citoyens. Un électrochoc sous forme de projet de reconquête.

Qui l’eût cru, cela fait partie des possibles dans le cadre d’un plan stratégique qui serait collectivement porté par les acteurs de la filière et bien compris de pouvoirs publics éclairés. Au plaisir culinaire de la consommation de poulets et autres volailles s’ajouterait alors la satisfaction de participer à un modèle économique, social et territorial porteur de valeur.

 


[1] Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires. Rapport au Parlement 2023 FranceAgriMer