Xavier Astolfi, Directeur général de Cristal Union

1/ Cristal Union est un groupe coopératif français parmi les leaders européens pour la production de sucre, de bioéthanol et d’alcool. Quelle est l’étendue de ses activités ?

Cristal Union est avant tout un acteur ancré dans les territoires, avec 13 sites de production situés dans la Somme, la Seine-Maritime, le Loiret, l’Aube et la Marne. Fort de 9000 coopérateurs, qui cultivent la betterave et la luzerne, le Groupe compte également plus de 2300 collaborateurs.

Chaque année le Groupe transforme 12 millions de tonnes de betteraves en plus de 1,5 million de tonnes de sucre, et près de 300 000 m³ d’alcool et de bioéthanol. Nos clients sont les secteurs de l’agroalimentaire, de la pharmacie, des cosmétiques, les pétroliers (carburants à la pompe) et nous avons réalisé cette année un chiffre d’affaires de 2,8 milliards d’euros.

Une étude Utopies Local Footprint® réalisée en 2022 a permis de mesurer qu’un emploi au sein du Groupe Cristal Union, soutenait 10 emplois sur le territoire français, avec une contribution particulièrement importante dans des secteurs stratégiques de l’économie française tels que l’industrie, l’agriculture, le transport et le commerce.

2/ L’industrie sucrière est une industrie lourde qui génère beaucoup de gaz à effet de serre. Quelles sont les actions de décarbonation que votre groupe a mises en place afin de réduire ses émissions directes et indirectes pour atteindre vos objectifs ?

Depuis plus de 20 ans nous travaillons pour optimiser nos consommations énergétiques et décarboner nos activités. Entre 2010 et 2020, nous avons achevé notre transition énergétique et ainsi réduit de 15 % nos émissions de CO₂ et de 8 % notre consommation d’énergie, avec l’arrêt du charbon au profit du gaz naturel et de la biomasse. Nous sommes engagés sur une trajectoire de décarbonation ambitieuse validée par le standard international SBTi, sur les 3 Scopes.  Et notre objectif de diminuer nos émissions de GES de 23 % en 2030, par rapport à 2019 est déjà atteint avec 7 ans d’avance ! Nous sommes surtout concernés par les Scopes 1 (émissions directes liées à l’activité de production) et 3 (transport vers les clients). Et nous entendons consolider ces résultats dans les années à venir.

Sur le plan industriel, nous agissons à plusieurs niveaux : les économies d’énergie, la récupération d’énergie résiduelle, et le remplacement de l’énergie fossile par plus de biomasse-énergie là où cela est possible. La piste la plus prometteuse est celle de sucreries 100 % décarbonées par l’utilisation d’une partie des pulpes de betteraves issues de la production de sucre comme source d’énergie. Ce projet qui pourra être opérationnel dès 2030 à Arcis-sur-Aube sera duplicable sur les autres sites du groupe. L’objectif est de rendre toutes les sucreries du Groupe autonomes en 2050.

Nous agissons dès l’amont agricole, avec la mise en œuvre des méthodes de production agroécologiques, comme la rotation des cultures, l’agriculture bas carbone et régénératrice avec l’outil de pilotage MyEasyFarm et l’attribution de primes RegAg pour les agriculteurs. Cette démarche agroécologique rémunérée s’inscrit dans une stratégie de long terme pour Cristal Union, pionnier dans sa filière en matière de durabilité. La coopérative, engagée avec le mouvement Pour une Agriculture Du Vivant (PADV) depuis 5 ans et propose déjà depuis 2015 un référentiel de durabilité CRISTAL VISION smart sugar beet pour une production betteravière plus durable. Cette démarche est valorisée commercialement par la filiale de Cristal Union, Cristalco, avec la première offre européenne de sucres et d’alcools agroécologiques et bas carbone AMPLIFY® à laquelle plusieurs clients du Groupe, sucre comme alcool, ont déjà adhéré.

Nous décarbonons l’ensemble de notre chaîne logistique de l’amont à l’aval. Nous pilotons arrachage et enlèvement grâce à la géolocalisation des silos de betteraves avec notre outil Cristal Coop, nous pratiquons le déterrage afin de ne transporter que les betteraves et expérimentons les camions 48 tonnes pour diminuer le nombre de véhicules en circulation. Nous avons également pour objectif de diminuer de 7 % les émissions de GES liées au le transport de nos produits chez nos clients (trajectoire validée par la démarche Fret 21 de l’agence de la transition écologique – ADEME) en optimisant le chargement des camions, en favorisant le transport multimodal, les carburants alternatifs et les achats responsables.

Enfin nous agissons sur nos emballages BtoB comme BtoC en diminuant au maximum leur part de plastique. L’utilisation du plastique a diminué de 64 % depuis 2019 et dès 2025, cette diminution atteindra 80 %.  Entre 2019 et 2023, nous avons également réduit le poids de ces emballages de 11 %. Depuis 2019, nous avons augmenté la recyclabilité de nos emballages de 80 à 99 % !

3/ L’eau est une ressource de plus en plus convoitée et le changement climatique oblige tous les acteurs à revoir leur mode de consommation pour réduire les tensions en cas de concurrence d’usages. Pouvez-vous présenter les mesures d’économie d’eau mises en place par Cristal Union et leurs impacts ?   

Au-delà des mesures de sobriété dans les usages et de l’adaptation des outils industriels visant à capter la vapeur générée par les processus industriels, Cristal Union a investi plus de 150 millions d’euros dans des solutions recyclage, de stockage et de traitement des eaux sur ses sucreries. Les prélèvements d’eau de Cristal Union ont ainsi été divisés par 3 entre 2010 et 2024. Aujourd’hui, 5 des 8 sucreries du Groupe sont déjà 100 % autonomes en eau et dès 2025, toutes les sucreries Cristal Union le seront.

Les synergies industrielles permises par l’eau stockée sont multiples. En effet, au-delà du processus sucrier, cette eau bénéficie également aux distilleries Cristal Union implantées à proximité des sucreries de Bazancourt et d’Arcis-sur-Aube. 6 à 7 millions de m³ d’eau sont ainsi produits chaque année par les sucreries du Groupe, et stockés dans des bassins pour les besoins d’irrigation. L’important réseau d’irrigation au départ des bassins de stockage permet ainsi d’irriguer les cultures avec l’eau contenue dans les betteraves. L’eau est ainsi redistribuée aux agriculteurs !